Comment nourrir un univers personnel sans se noyer dans les images ?
Trouver l’inspiration en céramique, ce n’est pas copier ce qu’on voit sur Instagram… C’est nourrir un langage personnel, en apprenant d’abord les mots pour ensuite écrire son histoire.
C’est ouvrir grand les yeux pour créer son propre univers.
Voici des pistes concrètes pour entretenir cette flamme sans tomber dans la surconsommation d’images ou l’uniformisation.
Lire, pour laisser le temps à l’inspiration de naître
La lecture est un terreau fertile. Contrairement aux images que vous scrollez à toute vitesse sur les écrans, un livre laisse place à la lenteur, à la rêverie, à l’imaginaire.
Je ne parle pas forcément des bibles techniques, même si elles sont indispensables, comme “Terres & glaçures” de Rhodes, ou plus récemment « Le Grand Livre de la Céramique » de Philip Rawson.
Mais aussi des livres plus “inspirés”, plus narratifs.
Un des plus récents est celui de Florian Gadsby, « By My Hands« .
Il raconte une trajectoire, une vision, une manière de vivre et penser la céramique.
Ce genre de lectures inspire au delà de la forme : il déclenche des questions, des élans, des choix.
Les revues, pour explorer le passé et rester connecté à la communauté
S’il n’y avait qu’une seule revue à avoir, ce serait la « Revue de la Céramique et du Verre ».
Ce magazine bimestriel est une référence depuis 1982. Il couvre de nombreux sujets autour de la céramique :
- Portraits de céramistes : interviews, focus sur des ateliers, présentations de parcours ou de démarches artistiques singulières
- Dossiers thématiques : autour d’une technique (le raku, la porcelaine, l’émail…), d’une tendance, ou d’un sujet de société (éco-responsabilité, transmission…)
- Critiques d’expositions : comptes rendus de salons, expos collectives, événements internationaux
- Des articles techniques : parfois très pointus, sur les fours, les matériaux, les cuissons, ou les outils
- Une sélection d’actualités : formations, résidences, appels à projets, nouvelles publications…
C’est une revue précieuse qui offre une vision panoramique de la céramique, qui donne la parole aux artistes et qui invite à repenser son propre travail. On peut aujourd’hui s’abonner à la version papier ou numérique, mais également acheter à l’unité de vieux numéros.
Mon rêve ? Reconstituer la collection en trouvant les anciens numéros originaux !
Les réseaux sociaux, avec conscience
Oui, Instagram ou Pinterest peuvent être de formidables outils d’inspiration. Mais à condition de ne pas s’y noyer.
Il ne s’agit pas de passer des heures à tout enregistrer sans jamais rien digérer. Il ne s’agit pas non plus de copier, d’envier, ou de perdre sa motivation par trop plein de success story.
Mon conseil : cherchez des artistes qui résonnent avec votre univers, pas seulement des céramistes. Designers, peintres, illustrateurs, photographes…
Ces croisements peuvent ouvrir des perspectives inattendues.
Et pourquoi pas engager la conversation ? L’inspiration passe aussi par le lien humain.
Rencontrer, discuter, échanger
C’est l’extension du point précédent. Rien de tel que le faire en présence des vrais humains 😉
Parler avec des gens qui ne font pas du tout de céramique vous oblige à reformuler, à expliquer, à sortir de votre zone de confort. Et ça nourrit. Les échanges élargissent la vision, secouent les habitudes, remettent en mouvement.
Je l’ai vécu suite à mon exposition à McArthurGlen, dans la Maison des Métiers d’Art à Douains. J’y exposais mes pièces, dans un espace tout à fait différent de mon atelier. Là-bas, j’ai réalisé que mon univers, installé dans mon quotidien de céramiste, ne résonnait pas de la même façon dans un lieu d’exposition plus vaste.
En discutant avec le directeur du lieu, l’envie de créer des pièces plus grandes, plus imposantes, plus majestueuses, a émergé. Ça ne m’était jamais venu à l’esprit avant. Cet échange m’a ouvert une nouvelle direction, que je n’aurais sans doute jamais envisagée seule.
L’inspiration naît aussi de ces regards extérieurs qui vous donnent une autre échelle ou simplement un nouveau point de vue.
Galeries et musées : voir pour de vrai
Il y a un monde entre voir une pièce en photo et la voir en vrai. Sa présence, son volume, sa texture… Tout est différent.
Visiter des galeries d’art contemporain permet de s’imprégner de formes, de comprendre des univers, d’ouvrir son esprit à d’autres manières de penser.
Visiter des musées, comme le Louvre, le Musée de la Céramique de Rouen, ou le Musée national de la Céramique de Sèvres, permet de sortir d’une esthétique Instagram uniforme. On découvre des techniques anciennes, des usages différents, des sensibilités qui nous paraissent lointaines et pourtant qui ont fait naître la céramique d’aujourd’hui.
Je suis persuadée que retrouver ses racines permet de faire émerger du neuf.
Tout poser sur papier
En écrivant, dessinant, gribouillant, les idées prennent forme. Ce qu’on a dans la tête reste flou, en mouvement. Le fait de poser les choses, de les matérialiser, aide à y voir plus clair. Ce n’est pas forcément pour faire un plan précis ou un croquis abouti.
C’est pour sortir ce qu’on a en soi, pour libérer l’espace mental et créer des connexions inattendues.
Notez ce qui vous attire, ce que vous avez vu, lu, ressenti. Faites des listes, dessinez des formes, collez des photos, écrivez des mots qui résonnent.
Créez vous un espace d’inspiration hors de votre tête, qui n’a pas besoin d’être beau ou logique. Il est là pour capter une énergie, une direction, un élan.
Tester, oser, être audacieux
Vous pouvez lire, regarder, admirer, remplir un dossier Pinterest… mais rien ne remplace l’élan de créer.
L’inspiration se transforme vraiment lorsqu’elle passe par les mains. Il faut tester, tenter des choses qui sortent de ce que vous faites habituellement. Même (et surtout) si vous ne savez pas où cela vous mènera. L’audace est une forme d’intelligence créative.
Laissez-vous surprendre par ce que vous faites lorsque vous ne cherchez pas à faire bien, mais à faire vrai.
En résumé : l’inspiration, ça se cultive
L’inspiration, ce n’est pas une illumination magique. C’est un terrain vivant à entretenir, nourrir, secouer parfois.
C’est un mouvement constant entre dehors et dedans. Entre ce que vous absorbez et ce que vous transformez. Tout est en vous, et vous devez juste créer les bonnes conditions pour que ça émerge.
Alors soyez curieuse, curieux. Et surtout, mettez les mains dans la terre. Parce que c’est là que tout commence.



